La vérité sur les produits de protection solaire: impact sur la santé et l’environnement (1)






Chaque été, les corps se découvrent et s’exposent au soleil pour avoir un teint halé, tant recherché, devenu signe de beauté et de bonne mine depuis ces dernières décennies. Toutefois, tous les scientifiques s’accordent sur le fait que l’exposition aux rayonnements ultraviolets (UV) est un facteur majeur dans le développement des cancers de la peau [1]. Pour faire face à ce réel danger, les industriels multiplient leurs offres (produits sous forme de crèmes, liquides, gels, sprays) et les consommateurs se précipitent aveuglement sur ces écrans anti UV sans se soucier de leurs longues listes d’ingrédients. Or, ces derniers peuvent avoir des effets délétères sur la santé et sur l’environnement dont les plus préoccupants sont les effets perturbateurs endocriniens.

Il existe 27 filtres UV autorisés qui entrent notamment dans la formulation des produits de protection solaire, mais qui sont aussi présents dans certains shampoing, vernis à ongles, crèmes de jour... Ces filtres se divisent en deux catégories: les filtres chimiques et les filtres minéraux.

Les filtres chimiques (ou organiques): sont des molécules synthétiques qui réagissent avec les UV en absorbant les rayonnements à la place de la peau.

Ils traversent rapidement la barrière cutanée et atteignent le sang d’où leur dangerosité. L’un d’eux, Benzophénone-3, a été trouvé dans 96 % des échantillons d’urine aux États-Unis et plusieurs filtres UV dans 85 % des échantillons de lait maternel de femmes suisses [2].

Ces substances chimiques ont fait l’objet d’étude en vue d’une évaluation de leur potentiel perturbateur endocrinien. Malgré la mise en évidence d’une activité œstrogénique de certaines d’entre elles, l’ensemble des travaux in vitro et in vivo, issus de la littérature scientifique, ne permettent pas selon le comité scientifique européen pour la sécurité des consommateurs (CSSC) de conclure quant au caractère perturbateur endocrinien de ces substances (tels sont les l’exemples de 4-methylbenzylidene camphor (4-MBC) [3], de la benzophénone-3 (BP-3) [4] , Ethylhexyl Methoxycinnamate appelé aussi l’octyl methoxycinnamate (OMC) [5]…). Autrement dit, le CSSC considère qu’au vu des connaissances scientifiques actuelles, ces filtres UV ne présenteraient pas d’effet œstrogénique pouvant altérer la santé humaine.

De plus, de par leurs utilisations massives ces dernières années, des traces de ces filtres ont été retrouvées dans l’environnement (eaux, sols, sédiments,) et un taux d’imprégnation, parfois significatif, de la faune aquatique ou terrestre a pu être observé [6]. Les scientifiques s’interrogent sur l’impact de ces substances sur l’environnement. Ils suggèrent des effets de type perturbation endocrinienne. Cependant, peu d’études, à ce jour, ont pu mettre en évidence ces effets malgré une imprégnation évidente. Une étude, en 2007, a montré une féminisation des poissons mâles (une modification des caractères sexuels, une modification histologique des gonades et un effet sur la fécondité), après 15 jours d’exposition à la benzophénone-2 [7].

Dans le même contexte, les récifs coralliens qui comptent parmi les écosystèmes les plus complexes et les plus riches en termes de biodiversité [8] sont menacés de disparition. En fait, le blanchissement des coraux (perte des micro-algues symbiotiques, appelées zooxanthelles, qui procurent aux coraux leurs nutriments et leurs pigmentations) devient de plus en plus fréquent, au cours de ces dernières années. Et ce phénomène peut à terme mener à la mort du corail. Or, dans le monde, plus de 500 millions de personnes dépendent directement de la survie des récifs coralliens (tourisme, pêche…) [9]. De plus, ces récifs coralliens protègent les côtes contre les vagues, les tempêtes, les inondations et l’érosion des bords côtiers en absorbant de manière très efficace
l’énergie des vagues, voire une partie de l’énergie des tsunamis
[10].

Selon les scientifiques, ce grave phénomène est principalement une réponse au réchauffement climatique. Mais il existe aussi d’autres facteurs qui facilitent ou provoquent le blanchissement des coraux, tels que les fortes luminosités, la présence d’agents pathogènes bactériens, la pollution, certains composés chimiques présents retrouvés dans les crèmes solaires [11]. Une étude publiée dans Environmental Health Perspectives, menée par une équipe de chercheurs de l’Université Polytechnique des Marches en Italie, a montré que certains ingrédients des crèmes solaires sont incriminés également dans le phénomène de blanchissement des coraux. Ces chercheurs ont constaté qu’une perte de zooxanthelles s’est produite 18 à 48 heures après une exposition à des quantités infimes de crème solaire et qu’un blanchissement total du corail est obtenu dans les 96 heures [12].

Pour repérer ces filtres chimiques, il convient de bien lire la liste INCI (Nomenclature Internationale des Ingrédients Cosmétiques) des produits de protection solaire. Vous pouvez consulter ce tableau [13] pour visualiser la liste complète de filtres chimiques utilisés en industrie cosmétique. 

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[1]http://soleilmodedemploi.e-cancer.fr/pdf/DP_INCaPrevention_melanome210607.pdf

[2] Kiefer B. Le mythe des crèmes solaires. Revue Medicale Suisse, 2018, volume 14, Pages 1056-1056. En ligne: https://www.revmed.ch/RMS/2018/RMS-N-607/Le-mythe-des-cremes-solaires

[3]https://ansm.sante.fr/var/ansm_site/storage/original/application/33fee8386bec681ef88e0f2c0a898280.pdf

[4]https://ansm.sante.fr/var/ansm_site/storage/original/application/f02d29c4e59e684737e4d3878b1a3b00.pdf

[5]https://ansm.sante.fr/var/ansm_site/storage/original/application/35a1721e1f93ff65d925822a9582a3d2.pdf

[6] Saint-aimé C. Les Filtres Ultra-violets : Quels Impacts sur l'homme et sur l'environnement? Thèse Pharm: Université de Poitiers. 2015. En ligne: http://nuxeo.edel.univ-poitiers.fr/nuxeo/site/esupversions/96ae35b3-9e06-4a6b-80cf-4ee0bb374b17

[7] Weisbrod C.J., Kunz P.Y., Zenken A.K. et Fent K. Effects of the UV filter benzophenone-2 on reproduction in fish. Toxicology and Applied Pharmacology, 2007, 225(3), Pages 255-66.

[8] https://www.encyclopedie-environnement.org/vivant/coraux-ingenieurs-oceans-menaces/

[9] https://www.lorient-agglo.bzh/fileadmin/user_upload/Actualites/Dossiers-de-presse/DOSSIER_DE_PRESSE_TARA_PACIFIC.pdf

[10] https://www.coralguardian.org/les-coraux-importants/

[11] Vidal-Dupiol J. Stress environnementaux chez le corail scléractiniaire Pocillopora damicornis : Du modèle expérimental à l'identification de marqueurs fonctionnels du stress. Thèse de Doctorat: Université de Perpignan Via Domitia. 2011. En ligne: https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00608572/document

[12] Danovaro R., Bongiorni L., Corinaldesi C., Giovannelli D. et al. Sunscreens Cause Coral Bleaching by Promoting Viral Infections. Environmental Health Perspectives, 2008, 116(4), Pages 441–447. En ligne: https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2291018/

[13] https://ec.europa.eu/growth/tools-databases/cosing/pdf/COSING_Annex%20VI_v2.pdf


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